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Les écoles doivent être des havres de paix

| Action politique, Justice sociale

Au Canada, nous envoyons tous les jours nos enfants à l’école en nous attendant à ce que tout soit fait pour assurer leur sécurité et qu’ils reviennent à la maison à la fin de la journée avec, nous l’espérons, des histoires positives à raconter, de nouvelles idées à explorer.

Même pendant la pandémie de COVID-19, malgré toute l’incertitude qu’elle a engendrée dans nos vies, le milieu de l’éducation a fait tout en son pouvoir, avec le soutien des gouvernements, pour rendre l’enseignement et l’apprentissage aussi sûrs que possible, tant à l’école qu’à distance. 

La tragédie de la fin de semaine dernière en Afghanistan nous montre à quel point nous avons de la chance de vivre au Canada. 

Bien qu’il se situe à des années-lumière d’Halifax, de Baker Lake et de Nelson, Dasht-e-Barchi est un quartier de Kaboul où, chaque matin, les enfants et les jeunes se lèvent, heureux d’aller à l’école pour apprendre, voir leurs amies et amis, et transformer leurs aspirations en réalité. Pour les élèves de l’école Sayed Al-Shuhada, cette routine a pris fin soudainement, samedi, quand une série d’explosions se sont produites devant l’établissement, tuant au moins 85 personnes et faisant 147 blessés. La plupart des victimes étaient des filles âgées entre 11 et 15 ans.

Et ce n’est pas un hasard si cet attentat s’est produit pendant que les filles étaient à l’école. 

Pendant des décennies, et plus particulièrement depuis une vingtaine d’années, l’Afghanistan a dû faire face à certaines des pires atrocités de l’histoire. La guerre perpétuelle et les conflits violents ont fait souffrir des générations de jeunes qui ne voulaient rien de plus que la possibilité d’étudier et d’aspirer à un avenir exempt de danger. Et pour les filles, faire des études dans ce pays est particulièrement dangereux. La possibilité même de leur émancipation menace un patriarcat résolu à museler les femmes. 

Ce qui s’est passé à Kaboul cette fin de semaine, nous devrions tous et toutes trouver cela odieux. Nous ne pouvons détourner les yeux, nous dire simplement que ce qui se passe ailleurs ne nous regarde pas. Il est vrai que cet attentat a été perpétré contre une école, qu’il constitue par le fait même une tentative de frein à l’éducation, mais ne vous y trompez pas : la cible, c’était les filles.

Encore aujourd’hui, en 2021, dans de trop nombreuses régions du monde, les femmes et les filles doivent toujours se battre pour avoir leur place à la table, une table qui continue de servir les hommes. Chaque microagression envers les femmes vise à les maintenir dans un état d’infériorité, quelques pas en arrière.

La pandémie que nous vivons a mis au grand jour les iniquités contre lesquelles les femmes continuent de lutter, même ici, au Canada. À la question « qui doit sacrifier carrière et ambition pour rester à la maison et élever les enfants? », nous avons obtenu la réponse cette année : les femmes.

Évidemment, nous ne pouvons pas comparer ce que nous vivons ici à ce qui s’est passé samedi à Kaboul. Renoncer à son travail pour s’occuper de ses enfants n’a rien à voir avec le fait de perdre un membre ou de perdre la vie en allant à l’école. Cependant, les attentats de la fin de semaine nous rappellent durement ce qui est en jeu pour la vaste majorité des femmes et des filles dans le monde. C’est pourquoi nous devons continuer de lutter pour l’équité entre les genres partout, et bien au-delà de nos frontières. Nous devons faire profiter les autres des progrès que nous avons accomplis dans notre société pour que même les possibilités les plus fondamentales que nous tenons pour acquises soient un jour à la portée d’une fille afghane qui a des rêves à réaliser.

Tandis que nous continuons d’élever nos voix en tant que porte-paroles en faveur d’une éducation publique de qualité, financée par l’État, de l’égalité des genres et de la justice sociale, nous demandons aux organisations de la société civile et aux gouvernements de tout le Canada de condamner cette violence et d’affirmer clairement que toutes les écoles sans exception doivent être des havres de paix, des lieux sûrs où l’enseignement et l’apprentissage peuvent se faire sans danger. Si nous ne l’affirmons pas clairement, alors nous risquons tous et toutes de perdre et de souffrir.

Shelley L. Morse
La présidente

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