Une ressource trop rare
Dans ce numéro de Perspectives, nous explorons les ressources éducationnelles sous des angles divers. Ces ressources peuvent venir de collègues enseignantes et enseignants, des organisations de l’enseignement ou des commissions et conseils scolaires, ou encore des administrations fédérale, provinciales et territoriales, et, ne l’oublions pas, d’Internet. Et puis il y a aussi les ressources que représentent les ateliers, les forums et les conférences qui peuvent être de riches sources de savoir et d’outils novateurs pour le personnel enseignant.
Ces ressources jouent un rôle fondamental pour les enseignantes et enseignants à l’affût de méthodes nouvelles pour mettre de la vie dans leurs leçons et leur présentation du programme d’études aux élèves.
D’après le dictionnaire d’Antidote (9, version 4), le mot
ressource
[r(e)surs]
a plusieurs sens, mais ceux qui nous intéressent sont les suivants :
Les ressources peuvent désigner des « moyens matériels et financiers », ou des « moyens dont dispose ou dont peut disposer une collectivité », comme les ressources naturelles d’un pays ou les ressources pédagogiques d’une école. Elles peuvent aussi représenter des « moyens qui permettent de passer à l’action » comme ces ressources que nous avons en nous et qui nous sortent parfois d’un mauvais pas de façon presque inespérée. Et puis il y a les fois où les ressources sont tout simplement les « possibilités qu’offre quelque chose », comme les ressources de la langue ou les ressources de la créativité.
Les ressources prennent donc toutes sortes de formes et c’est particulièrement vrai des ressources en éducation. Évidemment, le système d’éducation a besoin de ressources financières, mais cela ne s’arrête pas là. Il lui faut bien plus que l’argent pour acheter le matériel dont le personnel enseignant a besoin dans son travail avec les élèves.*
Si vous voulez savoir comment bien équiper une salle de classe aujourd’hui ou comment tirer le meilleur parti des ressources dans une salle de classe, demandez à une enseignante ou à un enseignant. Ils sont bien placés pour le savoir parce que ce sont eux qui conçoivent les plans de leçon et qui le font en gardant à l’esprit les besoins et les capacités d’apprentissage de chacune et chacun des élèves.
L’enseignante ou l’enseignant vous dira aussi qu’il est une autre ressource dont il ou elle a constamment besoin pour répondre aux besoins des élèves : le temps!
Oui, le temps de fouiller pour trouver le bon matériel pédagogique, le temps de réfléchir à la façon de l’utiliser dans la classe, le temps d’aller chercher le soutien qu’il faudrait à certains élèves, le temps de concevoir des plans de leçon à la fois solides et créatifs, et, bien entendu, le temps de les mettre en œuvre. Pour le personnel enseignant, il n’est pas simple dans les classes très complexes d’aujourd’hui de répondre à tous les besoins. De fait, selon un sondage national mené par la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants en 2014, le manque de temps pour planifier et préparer les leçons est l’une des principales sources de stress dénoncées par le personnel enseignant. Dans ces circonstances, trouver l’équilibre entre le travail et la vie personnelle relève presque de l’exploit, les enseignantes et enseignants devant composer avec des pressions grandissantes et une ressource, le temps, qui n’est pas élastique.
Maintenant, si nous revenons à notre définition, nous voyons que les enseignantes et les enseignants font eux-mêmes partie des ressources, vivantes celles-là, de l’école. Et cette ressource aussi est indispensable et limitée. Or, quand l’enseignante ou l’enseignant dépense son énergie sans compter, il épuise ses propres ressources. Pour éviter que cela se produise et pour que les enseignantes et enseignants puissent donner le meilleur d’eux-mêmes à nos enfants, nous devons les soutenir.
Les enseignantes et enseignants apportent tellement à leur classe. Ils comprennent le processus de développement et de croissance des jeunes, et ont de solides stratégies à proposer sur le plan pédagogique. Forts de leur créativité, ils bâtissent des milieux d’apprentissage chaleureux et stimulants. Pour que les élèves s’investissent dans leur apprentissage et tirent le maximum de leur expérience éducationnelle, ils doivent pouvoir le faire dans un milieu d’apprentissage et d’enseignement sain et bienveillant.
Pour aider les élèves dans leur apprentissage, le système d’éducation publique doit se concentrer sur la fourniture des ressources nécessaires, y compris le temps, et l’élaboration des politiques. Tout ce qui va au-delà n’est plus tant pour les élèves ni leur apprentissage. Que le système mette donc les outils dans les mains du personnel enseignant et qu’il lui donne le temps de planifier et d’utiliser ces outils, et alors les élèves connaîtront le succès. Après tout, ce succès et l’avenir des élèves ne sont-ils pas la raison d’être de l’éducation publique?
(H. Mark Ramsankar est le président de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants pour un mandat de deux ans, de 2017 à 2019.)
*D’après une enquête réalisée sur le sujet, chaque année, le personnel enseignant dépense des centaines de dollars de sa poche pour acheter du matériel et des fournitures à l’intention des élèves. (en anglais seulement)